Thursday 14 January 2010

#IranElection Article écrit par un vrai guerrier vert en Iran

Article écrit par un vrai guerrier vert en Iran et traduit de l’orginal Persan par

@sbelg

Le mouvement vert a atteint le point critique du point de vue de ses objectifs et de ses méthodes. La réaction populaire initiale à la publication des résultats des élections a été le scepticisme et l’exigence de l’annulation des élections. On voulait atteindre ce but par des manifestations silencieuses et pacifiques qui englobaient, de temps en temps, des slogans humoristiques.

Mais le temps a passé et l’unanimité n’est plus de règle pour les buts du mouvement. Pour certains, la chute du régime est un minimum alors que d’autres ont repris des slogans réformistes vieux de dix ans. Pour les buts de ces derniers sont des élections libres et la liberté de la presse. En ce qui concerne les méthodes, la crise est encore plus profonde. Nous sommes tous très intéressés par les possibilités de s’organiser offertes par les médias sociaux et nous voulons y imposer nos idées aux autres.

De telles méthodes d’organisation, en dépit de leur efficacité et de leur large diffusion, ne peuvent pas conduire le mouvement sur le long terme et leur créativité reste superficielle. Au mieux, elles peuvent faire descendre un grand nombre de personnes dans la rue à une date et un endroit donnés (pour des dates officielles comme le 13 Abân) mais elles informent également les forces répressives des détails des manifestations leur permettant d’effectuer un grand nombre d’arrestations et même de tuer quelques personnes. Il convient également de noter que nous avons tous une tendance inconsciente à jouer les victimes. Actuellement, en raison des violences sans limites exercées par les forces de la répression combinées au chantage religieux du gouvernement, personne n’accepte la responsabilité de conduire les manifestations populaires.

Descendre dans la rue est au mieux une tactique superficielle, ne servant qu’à nous rappeler que le mouvement vit toujours, mais elle ne peut pas conduire à un changement intrinsèquement. La seule raison de vivre du mouvement n’est pas de nous targuer d’avoir des martyrs, des prisonniers ou des otages, il nous faut un but que nous puissions décider, accepter, soutenir sans réserves et mener à bien.

J’avais écrit que nous avions deux voies à suivre pour progresser. La première c’est de décider sur un but assez large à long terme avec des méthodes flexibles et négociables au fil du temps, avançant quand nous le pouvons et battant en retraite quand nous ne le pouvons pas. La seconde, c’est d’avoir un but à court terme que nous pourrons atteindre, qui soit spécifique et non négociable.

Pour sa propre survie, chaque mouvement a besoin d’un but spécifique et mesurable. Disons, par hypothèse, que le but pour l’Iran soit la mise en place de la démocratie. Le régime actuel y répondrait par force superlatifs, déclarant que le gouvernement en Iran est par essence la démocratie la plus pure et la meilleure du monde. La réponse sera la même si nous exigeons la liberté de la presse et des élections. Mais si notre but est l’annulation des élections et le départ d’Ahmadinédjâd (ce qui était le principal objectif du mouvement avant la 17ème déclaration de Moussavi), alors nous avons un objectif spécifique et clair que le gouvernement ne peut pas écarter par ses campagnes de désinformation démagogique habituelles, un but universellement compris et mesuré par les membres du mouvement.

Le temps ayant passé, le départ d’Ahmadinédjâd et l’organisation de nouvelles élections en tant qu’objectifs du mouvement ont perdu en pertinence et le mouvement a deux carnets de route possibles :

1.    Il faut réduire l’activité politique du mouvement et mettre l’accent sur un objectif à long terme et des changements structurels. Pour créer un cadre pour ces changements structurels, il convient de se concentrer sur les activités culturelles et éducatives, ou bien

2.    Le mouvement doit se mettre d’accord sur un objectif à court terme et s’y tenir.

A cause de l’absence d’un nouvel objectif spécifique, de la durée de la lutte contre le gouvernement, de son caractère fatigant, les membres les plus conservateurs du mouvement, qui pensent en général à leurs propres intérêts en premier lieu, pourraient être tentés de quitter le mouvement alors qu’une nouvelle perspective les inciterait à prendre davantage de risques pour atteindre cet objectif.

Le mouvement vert a établi des objectifs à court terme, au moins en matière de slogans. Au début, ils se contentaient de traiter d’Ahmadinédjâd de menteur ou de mettre en question son résultat de 63% sont maintenant plus directs et conflictuels, s’adressant au dictateur en personne et demandant la fin de la dictature.

Les exigences de la plus grande partie du mouvement ont radicalement évolué ; alors, comment se fait-il que ses dirigeants, à savoir, Moussavi et Karroubi se refusent à les annoncer ouvertement ? Pourquoi n’en est-il pas fait mention dans la déclaration de Bazargân, Soroush, Kadivar, Gandji et Mohâdjérâni ?

L’exigence du départ de Khaménei est en réalité une demande d’un changement fondamental équivalente à la négation de la politique qu’il a menée durant les 20 dernières années ; dans le même temps, ce n’est pas une demande de renversement du régime ; ce n’est même pas la négation du principe du guide suprême. Les éléments les plus conservateurs du mouvement vert peuvent rester loyaux aux idéaux de Khomeiny (la loyauté au principe du guide suprême) et accepter en même temps que Khaménei ne soit pas qualifié pour remplir cette fonction.

L’astuce de Khaménei est de faire croire que le régime tout entier, c’est lui, ce qui sous-entend que le régime est articulé autour de sa  personne ; quiconque attaque Khaménei et ses choix attaquerait donc le système. Beaucoup d’intellectuels qui se concentrent uniquement sur ce pont d’un point de vue structurel tombent dans le piège et en déduisent que le problème c’est l’islam, la république islamique et le guide suprême, pas Khaménei.

Les structures n’existent pas en dehors d’une société humaine et de relations sociales. L’une des façons de changer la structure, c’est de changer les gens. La plupart des gens ne se sentent pas concernée par le débat abstrait purement intellectuel qui décrit la lutte entre tradition et modernité. Pur eux, le débat intellectuel est éternel comme la lutte entre le bien et le mal. On ne peut donc rien y faire et c’est l’histoire qui décidera du vainqueur. Même si on les amène à croire que c’est le bien qui va gagner, cette façon de penser ne génèrera que fatalisme et passivité, ce qui, au mieux rendra les actions inefficaces.

Métamorphoser le mouvement en débat intellectuel équivaudrait à détruire témérairement  les espoirs de milliers de personnes qui ont eu foi dans ce mouvement et dans sa victoire.

 

 


Posted via email from Liss's posterous

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